Sylvette Béraud-Williams est originaire du pays des Boutières en Ardèche, une partie du Vivarais qui s’étend le long de la vallée de l’Eyrieux. Fille de petits paysans,  elle entame des études de lettres modernes à l’université de Grenoble en 1968 puis à Aix-en-Provence. Frappée par la méconnaissance, voire le dédain qui s’y déploie vis à vis des cultures paysannes, et initiée en parallèle à la collecte de littérature orale par Jean-Noël Pelen, elle entreprend rapidement une recherche ethnographique sur la pratique du conte de tradition orale dans sa région d’origine. Elle progresse par cercles concentriques à partir de la ferme familiale, tend son micro à ses voisins et découvre un riche patrimoine oral.

Cependant, hormis des contes facétieux et quelques rares contes licencieux et contes merveilleux, mais aussi des bribes de récits légendaires et fantastiques, elle ne trouve pas ce qu’elle était partie chercher. De toute évidence, le conte n’occupe pas la même place dans les Boutières que dans les Cévennes, où Jean-Noël Pelen enquêtait alors. En revanche, elle découvre dans sa région une foisonnante tradition chansonnière, qu’elle étudie pendant près de 20 ans, y consacrant sa thèse de 3e cycle et de nombreuses publications.

Dès le début de son enquête, Sylvette Béraud-Williams rencontre Marie-Victoria Chazel. Pendant 10 ans, de 1975 à 1985, elle allait visiter fréquemment cette grande chanteuse. Elle tenait une grande partie de son vaste répertoire de son travail à l’usine dans sa jeunesse.

A la même époque, Sylvette Béraud-Williams rencontre plusieurs chanteurs et chanteuses de communes autour de Lamastre, dont Mme Soton à Gilhoc sur Ormèze, qui lui conte plusieurs souvenirs de la vie sociale du temps de sa jeunesse, les remèdes et croyances populaires.

L’enquête auprès de Mme Soton permet d’appréhender la posture et la démarche de Sylvette Béaud-Williams, qui détone dans l’univers des musiciens-collecteurs des années 1970. Ethnologue, elle ne porte pas un regard musicologique sur l’objet enregistré, mais prête en revanche une attention constante aux circonstances de chant et de transmission, ainsi qu’à la signification que chaque pièce du répertoire revêt pour les chanteurs. Ici, plus que les bribes de cette chanson, c’est le contexte de jeu, la reboule après le battage des blés, qui introduit la question des rythmes de la vie paysanne. Plus avant dans l’enquête, Mme Soton livre des souvenirs sur la vie sociale d'autrefois, les remèdes et les croyances populaires.

La recherche de Sylvette Béraud-Williams, très concentrée géographiquement, admet parfois quelques détours. Ainsi, au milieu des années 1980, de nouveaux contacts l'amènent à la rencontre de chanteurs et chanteuses du plateau et à l’ouest du département, à Saint Agrève ou à Lachamp-Raphaël, dont Émile Arnaud, qui lui chante plusieurs airs à danser.

Sa posture d’ethnologue l’a conduite à s’intéresser, peut-être davantage que les musiciens-collecteurs qui sillonnaient les campagnes françaises à la même époque, à la chanson comme un fait social, plus que comme un objet esthétique. Cette démarche, incluant la collecte d'histoires de vies, l’a amenée à s’intéresser particulièrement à la pratique du chant dans les usines et les ateliers, expérience que nombre de ses informatrices partageaient.

Il est intéressant de noter que la plupart des interprètes que Sylvette Béraud-Williams rencontre lors de son enquête dans les années 70 et 80 sont des femmes, et beaucoup d’entre elles ont travaillé dans les moulinages et les usines de soierie qui constituaient encore, dans la première moitié du XXe siècle, une importante activité économique en Ardèche. Elles lui transmettront un riche répertoire constitué surtout de chansons d'amour. Les hommes lui livrent plus volontiers, en français ou en occitan, des chansons de conscrits ou de mai, des refrains à danser et chansons de reboules (fêtes marquant la fin des travaux collectifs : moissons, fenaisons, battages du blé, vendanges...).

Par la suite, Sylvette Béraud-Williams a poursuivi ses recherches sur d’autres objets des sociétés rurales d’Ardèche, avec une attention particulière au travail. Elle continue de mener des enquêtes sur l’agriculture et la cuisine paysannes, le travail de la soie et l’industrie moulinière, les savoir-faire traditionnels, mais aussi sur l'histoire locale pendant la période 1939-45 avec l'implantation et le rôle des maquis.

Aujourd'hui lui tient beaucoup à cœur la transmission de l'objet collecté et sa revivification dans le cadre de projets actuels.