Historiquement, la fête de la Saint-Martin, le 11 novembre, est une tradition qui remonterait au Moyen-Âge. Dès le XVIIIe siècle, cette journée est consacré à la louée (1) des domestiques. La Saint-Martin célébrait surtout un temps festif : le seul véritable jour non travaillé symbolisant l’émancipation du valet face au maître. Jusqu’à la veille de la Seconde Guerre Mondiale, cette fête revêtait une dimension sociale singulière. De grandes foires et des bals étaient organisés, les gens de la ville n’y étaient pas conviés et leurs employés n’hésitaient pas à dépenser des mille et des cents pour inviter leurs zettes (2). Cirques, grandes roues, marchands ambulants, arracheurs de dents, singes savants, jeux de quilles et de tirs tenus par les bléquis (3), étals en tous genres, et, surtout, des flots de vin… constituaient le paysage  de cette célébration qui reste d’actualité dans les campagnes bressanes d’aujourd’hui, sous des formes revues au goût du jour…et du lieu. Défilés de tambours et fifres, fanfares, gastronomie, flots de vin et lampions : de Biarritz à la Bavière, les fêtes de la Saint-Martin s’adaptent aux traditions festives locales.

Quant aux chansons  de la Saint-Martin, elles ont en commun l’amour du vin bien sûr, un art de la caricature et des scénarios récurrents de maris cocus et de valets Don Juan. Notre archive de la semaine illustre bien cette thématique :

[…]Savez-vous ce que je bois,
Sète-vous ce que je bavou,
Quand je suis dans ma maison ?
Quand je sis dans ma mason ?
Le valet puis la maîtresse
Lou vôle et la maitrecha
De bon vin blanc
D’bon vin blanc
Et puis moi de la piquette,
E pi ma de la pequeta,
Pauvre Jean !
Peuvrou Zean !
Tra la la la la…

Savez-vous ce que je mange,
Séte-vous ce que que je mangeou,
Quand je suis dans ma maison ?
Quand je sis dans ma mason ?
Le valet et puis la maîtresse
Lou vôle pi la maitrecha
De bon pain blanc,
D’bon pan blanc,
Et puis moi du pain de seigle
E pi ma de pan de chelia,
Pauvre Jean !
Peuvrou Zean !
Tra la la la la…
[…]

Nous avons catalogué à ce jour dans notre base de données sept interprétations de chansons de la Saint-Martin (ci-dessous), pour la plupart enregistrées par l’association des Musiciens routiniers de Bresse, parmi lesquels figure Sylvestre Ducaroy. Spécialiste de la cornemuse, il a consacré son DEA d’ethnologie à l’EHESS à la tradition des conscrits.

Autres interprétations de chansons de la Saint-Martin :

La louée : date à laquelle les commis de ferme touchaient leurs gages et se présentaient à des nouveaux patrons potentiels.
2 Les « zets » et « zettes » : surnoms donnés aux fiancés bressans, le jour de la Saint Martin la tradition voulait qu’ils circulent en se tenant par le petit doigt.
3 Les bléquis : tenanciers forains